Entretien avec Bernard Cohen-Hadad, président de la commission financement des entreprises de la CGPME

Entretien avec Bernard Cohen-Hadad, président de la commission financement des entreprises de la CGPME– Etes-vous satisfait des conclusions du second rapport de l’OER ?
Nous sommes satisfaits qu’il y ait un travail de suivi de l’emploi des fonds, et que le débat sur la décentralisation ait eu lieu dans un souci de grande stabilité. Nous sommes satisfaits de voir que les crédits bancaires aux PME se sont maintenus et développés.
En revanche, nous nous interrogeons sur les entreprises qui en ont bénéficié, dans la mesure où aucun bilan n’a été fait sur ce point. Sont-elles des entreprises patrimoniales, des TPE, des professionnels, celles qui en avaient le plus besoin, ou des PME filiales de grands groupes ? Ce second rapport met l’accent sur le financement des particuliers à travers le Livret A. Nous espérons que le prochain se penchera sur les entreprises bénéficiaires des fonds non centralisés.

– Selon le rapport, toutes les banques ne rendent pas public un rapport présentant l’emploi des collectées alors qu’elles sont tenues de le faire en vertu de la LME. Ces rapports permettraient-ils de savoir à quelles entreprises sont octroyés ces prêts ?
Nous n’avons en effet pas de retour précis par banque et par région. Les banques elles-mêmes ne centralisent pas, à l’échelon local les chiffres de l’ensemble des crédits octroyés et les données nationales restent globales. Il faut améliorer la traçabilité des fonds à disposition des TPE et PME, dans l’intérêt de tous les acteurs économiques.

– La conjoncture issue des nouveaux développements de la crise en août 2011 risque-t-elle de rendre désormais plus difficile le crédit bancaire aux PME ?
En France, on a tendance à avoir la mémoire courte. Les banques françaises ont publié des résultats exceptionnels à mi 2011. Elles ont montré qu’elles ont passé avec succès les stress tests et avaient une position solide. Et ce n’est pas ainsi partout en Europe. Cet été a été marqué par de l’agitation, de la fébrilité et des raids spéculatifs. Cette fébrilité ne doit pas aller plus loin que le jeu des marchés et la raison économique devra l’emporter même si une agitation spéculative qui demeure est facteur d’instabilité.
Dans ce contexte, la situation des PME vis-à-vis des banques n’a pas changé. Nous mesurons l’implication des banques dans la couverture des dettes souveraines. Et Nous sommes dans l’attente de savoir dans quelle mesure les banques vont jouer le jeu auprès des TPE qui en ont le plus besoin au service du développement de l’économie, en adoptant une position ouverte en matière d’octroi de crédits. Pour nous, il n’y a pas raisonnablement de risque nouveau qui entraînerait une restriction du crédit. Nous pouvons seulement craindre qu’une exigence de régulation rendre plus difficiles les relations banques PME.

– Bâle III reste donc la principale cause qui pourrait impacter le crédit bancaire ?
Ce n’est pas seulement Bâle III, c’est la façon dont les banques s’y préparent et envisagent Bâle III dans leur process.

– La CGPME a demandé fin août plus de « transparence » aux banques sur leur exposition aux dettes souveraines…
Nous avons besoin de savoir comment se positionnent les banques dans leur soutien aux Etats. Avec l’exigence de réduction des dettes publiques, et le problème de solvabilité des Etats, qui fait aussi partie des préoccupations des PME, nous nous inquiétons de certains effets de dominos. Comment les banques vont-elles pouvoir jouer tous les jeux et répondre aux attentes des entreprises qui veulent se développer au niveau national et international, dans une zone euro qui doute, elle-même, de sa stabilité et de sa force monétaire.

– Quelles sont les attentes des entreprises vis-à-vis des banques aujourd’hui ?
Aujourd’hui, les petites entreprises attendent que les banques soient justes et simplifient l’accès au crédit dans le sens des engagements pris en mars 2010 sur les délais de réponse dans les 15 jours ou la motivation des refus de crédits.

– Etes-vous favorable à une motivation systématique des refus par les banques ?
Nous sommes favorables à une clarification des refus, comme une évolution du système de notation bancaire. Cela permettrait aux TPE-PME de se retourner rapidement vers d’autres partenaires bancaires en cas de refus. Dans cet esprit nous souhaitons une évolution de la Médiation du crédit, et la création d’un Conseil de Financement des Entreprises (CFE), une nouvelle instance visant à dresser le tableau national du financement des TPE-PME et de penser leur place dans notre économie.

– Qui ferait partie de ce Conseil de financement des entreprises et quel serait son rôle ?
Ce Conseil arrêterait les positions issues des réflexions sur le financement des PME. Aujourd’hui nous avons une myriade de missions, rapports, observatoires, qui ne sont pas forcément liés entre eux dans leurs problématiques. Ce Conseil serait placé sous l’autorité du ministère de l’économie, avec comme vice président exécutif un patron de PME. Il réunirait des représentants de la Caisse des dépôts, la Fédération bancaire française, la Banque de France, les organisations patronales, un représentant de l’Assemblée nationale et un du Sénat. Il intègrerait une Médiation du crédit, et une Médiation de la sous traitance allégées qui deviendraient des médiations d’urgence pour aider les TPE-PME en grande difficulté.

– Les PME ont-elles besoin d’investir, quelle est leur situation actuellement ?
Aujourd’hui les entreprises sont entre deux rives. Avant l’été, elles avaient une forte envie de développement, d’accès au crédit. Elles pensaient que les banques joueraient le jeu de la relance de l’économie. Le « tintamarre » qui semble tourner à « la crise existentielle » auquel on assiste depuis l’été conduit les TPE et PME à rester sur la réserve face à des problèmes sur dimensionnés et à des signes économiques plutôt contradictoires. C’est cela qui fait que les PME sont inquiètes d’un risque de resserrement d’accès au crédit qui pourrait résulter d’un surcroît d’autoprotection des banques. Mais les PME indépendantes ont toujours besoin d’emprunter pour investir, se développer et embaucher.

– Préconisez-vous toujours les solutions alternatives ou complémentaires au financement bancaire ?
Oui, encore plus qu’hier. Nous aimerions que se développe l’accès des PME au marché boursier, même si cette solution n’est pas la plus facile en l’état pour des raisons institutionnelles et de coûts. Il faudrait développer le financement des entreprises à travers l’assurance vie vers une plus grande ouverture des bénéficiaires, pour que toutes les PME puissent en bénéficier, et pas seulement les PME de croissance. Il y a aussi le recours au capital investissement et l’accès au marché obligataire qui sous certaines conditions sont attractifs .Tout cela fait partie de notre réflexion.
Néanmoins, la première source de financement des TPE-PME reste les banques. Et nous ne l’oublions pas. Il faut travailler pour continuer à améliorer la relation banques entreprises en se parlant davantage, avec confiance, transparence et clarté. C’est dans cet esprit que nous attendons l’arrivée de La Banque Postale en matière de financement des PME, fin 2011. Quelle sera réellement la nouveauté ? L’arrivée de La Banque Postale sur le marché TPE-PME se fera-ils avec le même souci éthique et d’engagement sociétal qu’elle a manifesté vis-à-vis des clients particuliers ? Ou verront-nous tout simplement l’arrivée …d’une banque ?

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