Les défis du patronat français après la déclaration de politique générale

Article publié le 17 janvier dans La Revue Politique et Parlementaire

Face à une instabilité politique qui fait peser le risque d’une crise économique aux conséquences sociales, les patrons doivent choisir de ne pas subir, en partageant la valeur dans l’entreprise, en accompagnant toutes les entreprises et en affirmant leurs valeurs communes.

Certes, dans sa déclaration de politique générale, le nouveau Premier ministre l’a rappelé : « l’entreprise produit les richesses et l’emploi » et elle cesse de produire « si elle se voit surchargée de prélèvements et de normes« . François Bayrou a affiché une conviction intime : « nos entreprises, nous devons leur faciliter la tâche« . Mais depuis la dissolution, les patrons ont le moral dans les chaussettes. L’inquiétude est leur lot quotidien. L’instabilité politique fait peser le risque d’une crise économique aux conséquences sociales potentiellement dramatiques. L’incertitude perdure sur les soutiens et le temps dont le Chef du gouvernement disposera afin de prolonger la politique de l’offre et rassurer durablement les milieux d’affaires.

Initier le partage de la valeur

L’obligation depuis le 1er janvier pour les entreprises de 11 à 49 salariés de mettre en place un dispositif de redistribution des bénéfices va dans le bon sens. L’ancien Premier ministre Gabriel Attal avait utilement lancé le débat de la désmicardisation. Quelle que soit la politique qui sera menée dans les prochaines semaines, et même si l’embauche à mission égale s’effectue d’ores et déjà à 20% de salaire en plus par rapport à 2019, les patrons français ne peuvent plus faire l’impasse sur la problématique de la rémunération de leurs collaborateurs, laquelle dégrade les relations sociales et la vie des entreprises.

les patrons français ne peuvent plus faire l’impasse sur la problématique de la rémunération de leurs collaborateurs, laquelle dégrade les relations sociales et la vie des entreprises.

C’est pour eux un enjeu tout à la fois social et sociétal. Au lieu de se fermer comme des huîtres lorsque le sujet de la revalorisation salariale est évoquée, les patrons doivent prendre eux-mêmes l’initiative d’ajuster les rémunérations de leurs collaborateurs en dessous du SMIC. Ils y gagneraient aussi car les pouvoirs publics seront alors davantage à l’écoute de leurs réclamations, pour maintenir la politique de l’offre, baisser les charges, simplifier les démarches administratives, renforcer la formation professionnelle ou encore diversifier les dispositifs de primes et de partage de la valeur.

Accompagner toutes les entreprises

Les chiffres ne mentent pas ! Les entreprises françaises subissent les crises à répétition et accumulent les difficultés : 68.000 défaillances d’entreprises sur les 12 derniers mois, 150 000 emplois menacés en 2025, 54% des entreprises qui reportent leurs projets de recrutement, etc. Les TPE-PME sont endettées et rencontrent des difficultés pour rembourser leur PGE. Les carnets de commande se vident. Les commerciaux sont dans le brouillard et n’ont plus de visibilité sur le moyen terme. Les fonds propres se réduisent comme peau de chagrin.

Pendant ce temps, alors que les TPE-PME doivent réussir leur transformation numérique, le grand chantier du choc de simplification pour alléger le fardeau administratif et normatif se fait toujours attendre, tandis que les institutions européennes continuent d’empiler les strates de contraintes fiscales et environnementales… Résultat : les chefs de TPE-PME sont sous l’eau, ils vivent un véritable parcours du combattant et se sentent souvent bien seuls face à l’adversité.

Affirmer des valeurs communes

Lorsque leurs intérêts sont menacés, les patrons savent s’unir pour présenter un front commun. Ils ont encore su le faire à l’automne pour affirmer leurs valeurs, promouvoir la liberté d’entreprendre et défendre le maintien de la politique de l’offre. Ils devront à nouveau savoir présenter un front uni face à une éventuelle remise en cause de la réforme des retraites, laquelle serait une insulte à l’avenir durable du régime par répartition.

Les combats prioritaires du patronat français doivent être ceux de l’amélioration de la qualité de vie au travail, du rôle croissant des entreprises dans la cité, de l’attachement à la liberté d’entreprendre, du renforcement de l’attractivité, de la hausse de la productivité et de l’affirmation des valeurs entrepreneuriales. Les chefs d’entreprise doivent aussi être capables de se remettre en question et d’accepter les réformes, par exemple celle de la fusion des chambres des métiers et des chambres de commerce dans les territoires. C’est à ces conditions que le patronat jouera pleinement son rôle d’accompagnement des entreprises dans les territoires, de sorte qu’elles soient les forces motrices des transitions et des progrès sociaux, sociétaux, environnementaux et numériques.

Bernard Cohen-Hadad
Président du Think tank Etienne Marcel

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