Alors que le Grand Débat National est lancé et que les gilets jaunes manifestent on peut se demander si, une fois de plus, la campagne pour les élections européennes ne va pas s’effacer devant des enjeux de politique intérieure. Et cela, dans un contexte de sortie difficile du Royaume Uni de la Communauté Européenne. Ce tohu-bohu et les poussées nationalistes de certains pays tiers mettent, d’ores et déjà, à mal l’éclairage sur les avancées de l’Europe depuis cinq ans. Pourtant l’Europe mérite beaucoup mieux que des querelles.
Brexit dur ou pas, il faudra avancer
Dans l’Europe les britanniques continuaient de rouler à gauche et de payer en livres sterling. Mais ce que nous vivons aujourd’hui, depuis l’adhésion du Royaume Uni en 1973 à la CEE est exceptionnel. On ne s’attendait pas à ce que les anglais « dans l’intérêt de leur économie » fassent le choix du Brexit. Et ce choix démocratique va durablement perturber le fonctionnement de nos PME. Et elles sont 19% en Ile-de-France à exporter vers le Royaume Uni. Les grandes entreprises, qui vivent l’international au quotidien, ont anticipé et préparé des scénarios différents. Mais pas les PME qui sont dans l’expectative des nouvelles mesures douanières et réglementaires. Bercy n’a pas lésiné sur les moyens web, ainsi que les organisations patronales pour informer les entreprises mais faute d’éléments précis on ne peut… qu’alerter. Quant aux scénarios catastrophes, s’ils ont le mérite de sensibiliser ils ont tendance à être anxiogène alors que 50% des entrepreneurs pensent que l’Europe est une valeur ajoutée pour l’économie. Quoi qu’il en soit « deal ou no deal » nos PME devront, hélas, faire avec. Et l’Europe devra continuer d’avancer.
Des élections pas comme les autres
L’élection européenne a toujours eu quelque chose de différent par rapport aux autres échéances politiques. Elle a toujours déclenchée les passions et les formules telles que « le parti de l’étranger » ont été dures. Pourtant la dimension européenne doit placer le débat au-dessus des querelles partisanes pour transcender les idées et valoriser les enjeux qui, en Europe, doivent nous rassembler. Et cela malgré notre histoire, nos langues et nos traditions différentes. C’est vrai, on voit peu sur le terrain, dans nos villes et nos campagnes, les parlementaires européens mais si vous en rencontrez ils vous diront que ce mandat, et leur action, est riche de découvertes, d’engagement et de progrès sociaux et humains. Alors que les obscurantismes montent en puissance on voit bien les thèmes des campagnes à venir : querelles sur la souveraineté, sentiment de ras-le-bol contre les élites et la « bureaucratie européenne », absence de représentativité, l’Europe est l’objet de nos malheurs… Alors que nous attendons une vraie ambition européenne à partager.
la dimension européenne doit placer le débat au-dessus des querelles partisanes pour transcender les idées et valoriser les enjeux qui, en Europe, doivent nous rassembler.
Une Europe de progrès
Pour beaucoup de générations, surtout les jeunes, l’Europe c’est évident. Il suffit de voir la réussite du programme Erasmus. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de problèmes d’ajustements des politiques communes. Ou que les Etats ne doivent pas défendre leurs positions. Personne n’a oublié les moments difficiles vécus par nos entrepreneurs avec les politiques agricoles. Et récemment encore, le refus de la fusion Alstom-Siemens a été une erreur. Mais la beauté, pour ne pas dire « la grandeur » de l’Europe c’est justement d’arriver à dépasser ses divergences. Et de maintenir une paix durable depuis des années. Et nos PME ne s’y trompent pas, elles applaudissent à la mise en place de l’Euro comme aux moyens d’interventions à la Banque Européenne d’Investissements puisque 54 % d’entre-elles redoutent une disparition de l’Euro. Alors que le lien de confiance entre les politiques, les électeurs et les acteurs socio-économiques semble distendu, alors qu’il y a une attente dans la mise en place d’un nouveau projet européen nous devons rappeler sans réserve que pour que l’Europe soit utile, comme l’air que l’on respire, elle doit être ouverte et ne pas tourner le dos au progrès.
Bernard COHEN-HADAD
Président du Think tank Etienne Marcel
Article publié le 14 février sur Les Echos
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