La semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées vient de se terminer. Elle a été occultée par la question de l’augmentation du gazole, les gilets jaunes et l’affaire Carlos Ghosn. Est-ce dommage ? Bien entendu, mais ce n’est pas pour autant que rien ne bouge. Car l’emploi des travailleurs handicapés est, et doit rester, une préoccupation au quotidien dans nos territoires. Il doit aussi s’apprécier sur le long terme.
Des entreprises de plus en plus impliquées
La situation a-t-elle progressé depuis la loi du 10 juillet 1987 qui impose aux entreprises privées de compter, dans leur effectif, un minimum de 6 % de personnes en situation de handicap ? Sur le terrain, les entreprises sont de plus en plus actives au titre de leur engagement sociétal. La diversité comme le bien être au travail sont entrés dans les entreprises. Dans la mesure du possible, elles répondent à leurs Obligations d’Emploi des Travailleurs Handicapés (OETH) soit directement, par l’emploi de salariés handicapés soit via des passerelles telles que la conclusion de contrats de sous-traitance, de fournitures, de prestations de service ou de mise à disposition de travailleurs handicapés avec des Établissements et services d’aide par le travail (Esat), des Entreprises adaptées (EA) ou des Centres de distribution de travail à domicile (CDTD)… Ce maillage est fait en profondeur avec les organisations professionnelles et les associations. Il convient de valoriser ces bonnes pratiques, les promouvoir et faire de la pédagogie. Les bonnes volontés et les actions sur le terrain existent. C’est pourquoi on ne peut pas laisser dire que « généralement » les entreprises préfèrent s’exonérer, de leur obligation, en versant une contribution financière. Et oublier que nos PME comme les grandes entreprises sont en recherches de compétences et de profils qualifiés, valides ou non.
Une forte proportion de séniors
La population des travailleurs handicapés a ses particularités. Elle travaille prioritairement dans le secteur privé. Les chômeurs, en grande majorité, sont de longue durée: 48 % d’entre eux sont des seniors de 50 ans et plus. Ils ont déjà travaillé précédemment dans des activités physiques ou manuelles et doivent désormais s’orienter vers des métiers administratifs. Il s’agit de vrais changements dans leur vie. Certains d’entre eux ont perdu les « codes » du monde du travail. Pour beaucoup, aussi, leur handicap n’est pas visible : troubles du comportement, problème de concentration, d’audition, de mémorisation… C’est pourquoi le retour à l’emploi est souvent difficile. Et ils ne peuvent assurer seuls leur reconversion et leur montée en compétences. D’autant que cet ajustement prend du temps et que, dans un monde du travail en tension, la demande de compétences réclame un retour immédiat.
Mobiliser tous les acteurs
Personne ne gagnera la bataille de l’emploi des travailleurs handicapés, seul ! Et s’il faut rester vigilant, multiplier les contraintes légales ou réglementaires n’aura qu’un effet contre productif. Une loi existe, appliquons déjà la loi ! C’est pourquoi, la mobilisation de tous les acteurs est indispensable. Beaucoup de bonnes volontés existent déjà. Les actions passent par la sensibilisation directe des entreprises, la mise en place d’actions spécifiques en intégrant les profils dans des sourcings de candidats valides. La bonne collaboration des entreprises avec les collectivités, Pôle emploi, CAP emploi, les ESAT, les associations est indispensable. Il faut la renforcer. On attend aussi beaucoup du développement des projets à destination des jeunes, des alternants. Comme assurer, avec l’école et les établissements spécialisés, la découverte des métiers et des savoir-faire afin de faciliter l’insertion professionnelle. C’est vrai, face à la tache à accomplir on a l’impression que l’on n’en fait pas assez. C’est donc une bonne raison pour faire plus !
Bernard COHEN-HADAD
Président du think tank Etienne Marcel
Président de la CPME Paris-Ile-de France
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