Il est des années qui se terminent mal et d’autres qui ne commencent pas vraiment mieux pour les PME. L’année 2018 s’est terminée avec la crise des Gilets Jaunes et une chute de nos chiffres d’affaires : 45 % de baisse, en décembre, dans certaines activités. Dans beaucoup de rues commerçantes c’est la désolation. Rien, même les soldes, ne permettra de récupérer ce qui n’a pas été gagné. Et comme si une peine ne suffisait pas certains poussent le gouvernement à prendre en 2019 une ordonnance supprimant le Taux Effectif Global (TEG) pour les prêts aux entreprises.
Le TEG, un élément de comparaison
Le TEG tout le monde en a entendu parler. C’est un indice de référence et un élément d’information dans les contrats de crédits entre les établissements financiers, les banques, les assureurs-crédit pour tous ceux qui empruntent. Il est actuellement obligatoire pour tous les financeurs dans tous les contrats de prêts y compris ceux des entreprises. Il permet au chef d’entreprise, commerçant, artisan, indépendant, quel que soit son niveau de compétence financière d’avoir un élément de comparaison des offres de crédits de ses financeurs, sur la base d’un même indice. Il en est de même pour les contrats de découverts. L’entrepreneur peut savoir ce que son engagement à long, court ou moyen terme ainsi que les frais financiers vont lui coûter. Et voir s’il fait une bonne ou une mauvaise affaire ! Mais apparemment c’est trop « compliqué » pour les financiers, certains considèrent que le TEG donne une « vision biaisée » des coûts financiers et n’est pas un élément de lisibilité pour les contrats à court terme. Le monde à l’envers.
Simplifier n’est pas créer une nouvelle opacité
Un rapport maladroit, publié en 2017, reprend ces propositions. A contrario, la même année, un sondage de la CPME révèle que 60 % des PME interrogées considèrent que le TEG est une « source de négociation » avec son interlocuteur financier. Et pour 44 % des PME interrogées, le TEG permet également d’appréhender les coûts annexes du crédit. Afin de simplifier la réglementation et limiter la sur-transposition de directives européennes, le gouvernement a pensé, au premier semestre 2018, supprimer le TEG. La raison et la lucidité l’ont emporté temporairement. La loi pour un Etat au service d’une société de confiance (loi ESOC) promulguée, en août 2018, maintient donc la mention obligatoire du TEG pour les contrats de crédit à taux fixe mais « habilite le gouvernement à prendre par ordonnances dans les douze mois » des mesures visant à supprimer le TEG lorsque ce n’est pas approprié. Aujourd’hui, les cartes semblent rebattues. Et l’on veut supprimer la mention obligatoire du TEG pour « tous » les prêts aux PME. Ce n’est pas acceptable !
Les banques à l’écoute des PME
Alors que les banques et que les assureurs-crédits souhaitent renforcer les relations banques TPE-PME et qu’elles travaillent à améliorer la lisibilité des offres bancaires, on peut juste se demander pourquoi cette obstination à vouloir ajouter des écrans de fumée dans une période compliquée pour nos PME. Nos PME attendent plus de transparence. Des efforts nouveaux d’accompagnement des entreprises sont engagés par les réseaux bancaires, c’est cette méthode qu’il faut encourager. D’autant qu’il semble, dans le contexte actuel, que les banques, comme les assureurs-crédits, ne souhaitent plus la suppression du TEG, faute de pouvoir le remplacer par un autre indice, plus lisible et juridiquement plus sûr. Un grand banquier central aime à citer la formule « il faut savoir ne pas jeter le trouble sur la valeur des choses certaines ». Espérons qu’en 2019, le gouvernement et les parlementaires de terrain sauront réagir et intervenir pour laisser au placard les fausses bonnes idées qui n’apportent, en réalité, rien d’autre que de nouvelles turbulences.
Bernard COHEN-HADAD
Président du think tank Etienne Marcel
Président de la Commission financement de la CPME